700 ans de révoltes occitanes

Gérard de Sède ‹ De l’Aquitaine à la Provence et au Languedoc, les multiples manifestations d’une culture de résistance à l’oppression.

700 ans de révoltes occitanes. Gérard de Sède. Editions Le Papillon Rouge 2013 (édition originale, Plon 1982).

700 ans lutte oc

Certaines sont célèbres, comme la « révolte des gueux » en 1907, celles des Camisards ou des Demoiselles, les « communes » de Marseille et de Narbonne (1871), la lutte contre le camp du Larzac, les événements viticoles de 1976 aboutissant au drame de Montredon… D’autres le sont moins, comme le combat du moine Bernard Délicieux contre l’Inquisition (XIIIe siècle), la révolte des Tuchins (XIVe) et des Croquants ou encore le soulèvement en Provence contre le coup d’Etat de « Badinguet » (Napoléon III) en 1851, soulèvement qui connut ses points culminants dans les Basses-Alpes et le Var.
« 700 ans de révoltes occitanes », de Gérard de Sède, raconte ces révoltes, avec force détails documentés, et montre ce qui les relie. Edité pour la première fois en 1982 (chez Plon), ce livre vient d’être réédité par les Editions Le Papillon Rouge. Avec deux préfaces, l’une de José Bové, l’autre de l’écrivain Yves Rouquette.
Ces révoltes en pays d’Oc ont de nombreux points communs. Même si l’Occitanie n’a jamais, à travers son histoire, été regroupée dans un Etat unifié, elle n’en recouvre pas moins, à diverses époques, outre un territoire, une réalité culturelle commune. Réalité, comme le dit Gérard de Sède, marquée par une langue, celle du peuple, mais aussi, au Moyen Age, celle des troubadours, et aussi langue administrative écrite. On peut parler plus largement d’une culture commune des pays occitans dont les traits saillants sont des tendances égalitaires, une tolérance y compris religieuse et le goût de l’émancipation politique et sociale, qui s’exprime notamment dans l’existence d’une paysannerie libre à l’époque du servage et l’essor précoce des villes et du commerce.
Pour l’auteur, les soulèvements qui ont émaillé l’histoire de l’Occitanie sont avant tout « une chaîne continue de protestations, violentes ou larvées », du Moyen Age à nos jours, en opposition au pouvoir centralisateur de Paris, une manière de « se poser en s’opposant ». Et avant tout de réagir à l’injustice.
« L’irrédentisme occitan sporadique, confus » qui ressort de ces révoltes, comme le dit Yves Rouquette, a toujours un fonds social que Gérard de Sède décrit avec netteté : « la misère, le poids de l’impôt, la surexploitation de la main-d’œuvre paysanne ou manufacturière qui met les masses en mouvement bien plus contre une condition quotidienne qu’en faveur d’une autre organisation politique de la France » (Y. Rouquette).
Quoique dans certains de ces soulèvements la proposition d’une organisation autonome, d’une « gouvernance locale » comme on dirait aujourd’hui, est très présente même si elle ne va jamais très loin.
Ce livre, lu ou relu en 2013, peut, estime Yves Rouquette, « susciter un sursaut d’imagination et d’audace à une Europe des Etats impotente et bloquée, notamment pour avoir fait l’impasse sur ses peuples, ses métropoles multiples, sa production industrielle et le sort de ses ouvriers ».

Philippe Cazal (paru dans le Paysan du Midi, juin 2013)

« 700 ans de révoltes occitanes », Gérard de Sède, Ed. Le Papillon Rouge 2013 (20,90 €).

Lire aussi, dans ce blog, « 1907, la Révolte du Midi« , de Jean Sagnes et Jean-Claude Séguéla.



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